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SUR MON CHEMIN

mâmes fort heureux d’en sortir, après avoir cru fort longtemps que nous devions y rester. »

Prenons les choses par le détail et traçons une sorte de journal de bord, qui sera plus éloquent dans sa sécheresse, dans la simple énumération des aventures que nous eûmes à traverser que toutes les phrases descriptives et que tous les discours de protestation contre des malheurs qui ne nous sont point particuliers et sur lesquels on sut glisser jusqu’à ce jour avec une habileté bien compréhensible.

Le silence ! Tel est le mot d’ordre que l’on observe ici sur tous les événements qui se passent entre Kiel et Brunsbuttel. L’administration locale a le doigt sur les lèvres ; un doigt de bronze sur des lèvres de marbre. Nous n’avons point les mêmes raisons pour nous figer dans un pareil mutisme. Du reste, la Renommée, cette vieille concierge, semble avoir accompli son œuvre malgré toutes les barrières dont on voulut entraver sa course babillarde. En deux jours, nous rencontrâmes un navire dans le canal de Kiel. Il était norvégien, tout seul, tout petit, tout isolé et tout triste dans la vaste plaine, et peut-être regretta-t-il d’être venu là, puisque nous l’accrochâmes.

Or donc, le 6, à dix heures du soir, nous fîmes tous les signaux usités en telle occurrence pour embarquer un pilote. On nous laissa brûler nos feux.

On ne nous répondit point. Rien ne vint à