Aller au contenu

Page:Leroux - Sur mon chemin.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
147
MÉSAVENTURES D’UN PAQUEBOT

notre bord, ni personne. Résignés, nous dûmes mouiller.

Le 7, à six heures, nous levons l’ancre. Nous avons à notre gauche la manifestation respectable de la puissance maritime allemande, l’escadre qui mire dans les eaux de Kiel l’éclatante blancheur de ses carènes, qui semblent des murs de pierre troués de meurtrières noires, et de ses mâts, qui sont des tours. Nous marchons vers l’entrée du canal, vers ces deux portes colossales et sombres qui arrêtent le flot baltique.

Un pilote est monté à notre bord. Sur la question du commandant Marchal relative à la nécessité d’un remorqueur, il répond d’un air sibyllin que cette mesure de précaution lui apparait bien inutile. À six heures et demie, nous entrons dans le canal. Formalités. À sept heures quarante-cinq, nous passons les écluses. Je ne ferai point de description. Nos confrères qui assistèrent à l’inauguration se sont chargés de ce soin. Ils nous ont dit la verdeur des prés et la fraîcheur des coteaux, les notes de couleurs jolies mises par les cottages de briques sur les fonds sombres des bois. Et les moulins qui tournent, et les pâturages d’herbe grasse où paissent les vaches rousses, tout ce paysage charmant où le canal déroule son ruban d’argent, large de 64 mètres et trop étroit encore.

Le Versailles, majestueux et lent, glisse depuis une heure entre les rives fleuries. Plein de confiance en lui-même et en son pilote, que surveille