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FOUETTE, COCHER !

Et il invita, sans rancune, son confrère impatient à prendre un « mêlé-cass. »

Si monsieur veut être des nôtres, fit mon automédon, j’en serai reconnaissant à monsieur. J’ai accepté la consommation de monsieur, monsieur ne refusera pas la mienne.

J’étais entre les mains de cet homme. Intimidé par le ton qu’il prit pour me dire cela, et persuadé que la compote de tramways s’étalerait quelques minutes encore sur la chaussée, n’ayant point perdu, en outre, l’espoir de rentrer chez moi avant les heures indues, je me laissai servir un « verre de la bouteille ». J’avais pudiquement refusé « un demi-setier du broc ».

Les deux camarades, après le « mêlé-cass », commandèrent un « pompier ».

À ce moment, les véhicules commençaient à s’ébranler. J’en fis discrètement l’observation. Ils vidèrent d’un coup leur verre, en s’écriant : « Une, deux, trois, camarade, sauve-toi ! »

Nous nous sauvâmes. La rue de Rivoli fut traversée. On parcourait au grand trot les Halles, entre la double rangée des globes électriques, pâles et bleus, tel un soleil de minuit tiré à vingt exemplaires.

Avant de disparaître dans la rue Montorgueil, je pus constater qu’il était, au cadran de Saint-Eustache, sept heures dix, exactement.

Ce qui arriva par la suite dépasse toute imagination. Nous nous butâmes à une transformation de pavé, au coin de la rue Étienne-Marcel.