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POUR LES GRINCHUS

chaînes, le grincement des grues, les sifflements de la vapeur et le roulement de ce Trottoir qui est le chemin, la route, la rue de l’avenir. Alors, sans doute, il se déplacera sans bruit, transportera d’une mer à l’autre des auberges et des villages, et remplacera avantageusement des véhicules aussi défectueux que celui qui nous traîne à cette heure. Ce petit Trottoir me plaît ; grâce à lui, l’homme, qui est un Petit-Poucet, chaussera bientôt des bottes de sept lieues. Je ne vous cache point que le bourdonnement immense qui monte de cette ruche formidable qu’est l’Exposition m’a quelquefois gêné dans mon sommeil. Je ne m’en plains pas. Je savais que Paris travaillait à la chose la plus gigantesque qu’ait tentée le génie humain, et que dans le décor de plâtre, aussi merveilleux que passager, que nous décrivait tout à l’heure M. l’artiste de café-concert, la France donnait rendez-vous au labeur prodigieux et forcené des peuples ; je savais qu’en nous quittant, des millions de bouches clameraient notre gloire sur la Terre, et, en me disant ces choses, j’attendais patiemment le sommeil. Que voulez-vous, messieurs, je suis patriote ! »

Tous les grinchus affirmèrent qu’ils étaient également d’ardents patriotes et qu’ils étaient prêts « à verser leur sang pour leur pays ».

« — La patrie, pour le moment, ne vous en demande pas tant, continua cet homme plein d’imagination et de bon sens. Sacrifiez simple-