Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/494

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seront amortis, quand le propriétaire et le locataire auront pour une somme minime l’éclairage et l’eau à leur disposition dans les appartements les plus modestes, lequel parmi eux se dira que sa modique redevance représente seulement l’entretien, mais non les dépenses de premier établissement, de services aussi dispendieux à installer et aussi essentiels ? À l’heure actuelle même, dans les lavoirs qui se rencontrent en tant de villes et dans les bains publics que l’on trouve en quelques-unes, qui se dit que ce sont là des arrangements qui ont été coûteux, qui sont l’œuvre des hommes et pour lesquels l’on ne paie rien ? Qui fait une réflexion du même genre pour les égouts ? Dans 70 ans quand tous les chemins de fer existant en France et ayant coûté une vingtaine de milliards à construire auront fait retour à l’État, quand il sera possible de réduire de moitié, peut-être même des deux tiers, les prix de transport, qui se rendra compte, en payant 20 ou 25 francs (le salaire de trois ou quatre journées du travail le plus ordinaire) pour se rendre de Paris à Marseille, qu’il n’acquitte que les frais d’entretien et d’exploitation des chemins de fer, mais qu’il jouit gratuitement du capital énorme ayant servi à les établir ?

La richesse sociale commune, dont chacun a la jouissance collective, nous entoure ; et de plus en plus elle nous entourera ; de plus en plus elle approchera en valeur de la richesse appropriée, pour un jour la dépasser.

Il n’a jamais été fait de statistique générale de la valeur de l’ensemble du domaine public en France ; une partie seule de ce domaine, non pas la plus considérable, a été, à quarante années de distance, en vertu d’une loi de 1833 et d’une loi de 1873, l’objet d’évaluations plus ou moins précises. À la première de ces dates on estimait à 536 millions de francs en chiffres ronds, les propriétés immobilières appartenant à l’État tant à Paris que dans les départements, qui étaient affectées à un service public quelconque. C’était là un chiffre bien faible, dont la modicité au premier abord surprend. Mais il ne s’agissait que du domaine public monumental appartenant à l’État ; celui des départements et des communes restait en dehors. En outre beau-