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mutuelle des deux époux semblait un gage assuré de leur futur bonheur.

Cependant un an s’était à peine écoulé que Jean, dont l’amour avait résisté à l’absence et aux obstacles, se lassa tout à coup d’une félicité dont rien ne venait interrompre le cours. Le caractère sérieux et les douces vertus de Marguerite, qui l’avaient tant charmé d’abord, perdirent à ses yeux tous leurs attraits. Il ne sentit plus que l’opposition qui existait entre leurs goûts et leurs habitudes.

La vie aventureuse que Jean avait toujours menée, l’inconstance de son cœur, le besoin d’agitation et de changement qui lui était naturel, lui rendirent bientôt insupportable l’existence régulière et un peu monotone qui lui était imposée.

De son côté, Marguerite qui avait, dans sa pensée, divinisé son époux, fut douloureusement surprise en lui trouvant des torts qu’elle avait excusés jadis, et qui lui parurent insupportables lorsqu’elle en souffrit. Malgré les inquiétudes jalouses que lui causait la légèreté de Jean, Marguerite l’aimait toujours, mais elle avait perdu la confiance qu’elle avait en son amour, et c’était son plus grand tourment.

Cependant aucune infidélité réelle n’était encore venue désespérer le cœur de Marguerite, lorsque Jean devint passionnément amoureux d’une jeune et jolie modiste, nommée Zéphyrine.

Ce choix paraissait en tout conforme à la nature de Jean, car Zéphyrine était aussi inconstante et coquette que son amant était infidèle.

Sans songer aux devoirs que Jean trahissait pour elle, Zéphyrine se montra heureuse et fière de son choix, et ce fut sans hésiter qu’elle accepta l’amour qu’il lui offrait.

La mutuelle sympathie qui manquait à l’union de Jean, et qui avait rendu le bonheur de Marguerite impossible, semblait assurer la durée de cette coupable liaison.