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Il comprit aisément tout ce que devaient souffrir deux femmes sans appui, dans une ville où elles étaient étrangères. Avec tout le zèle d’une pieuse amitié, il se fit remplacer à Saint-Sébastien, et se hâta d’accourir près de ses amis affligés. Sa présence fut d’un grand secours à Mme Barton et à Rose qui les aida dans les soins à donner au malade, et parvint quelquefois à calmer les agitations de ce dernier.

Cependant l’étranger, auquel Donatien avait sauvé la vie, n’était pas moins dangereusement malade que lui ; plusieurs fois on le crut sur le point d’expirer, et l’abbé Gervais ne lui refusa ni ses soins ni ses consolations. C’était un riche Espagnol qui venait en France, où sa femme avait des parents. Cette dernière avait péri dans le naufrage. Cependant, quoique plus malade que Donatien, l’Espagnol fut bien plus promptement guéri, et il était déjà reparti lorsque le médecin déclara que Donatien était hors de danger.

Ce fut sans doute un miracle opéré par l’amour, et Rose, en acquérant la certitude de conserver la vie de Donatien, sembla renaître elle-même en retrouvant l’espérance.

Bientôt Donatien put reconnaître celle qu’il aimait ; sa présence lui révéla, et le danger qu’il avait couru, et l’affection dévouée qui avait survécu à tout ce qui aurait dû la détruire. Des torrents de larmes exprimèrent seuls d’abord à Rose l’amour et la reconnaissance dont son cœur était pénétré.

La convalescence de Donatien devait être longue, et il était encore impossible de prévoir l’époque de son retour à Saint-Sébastien. Cependant, tout entier au bonheur d’avoir retrouvé Rose, dont il avait cru être séparé pour jamais, il paraissait avoir oublié le passé et ne penser qu’à se laisser vivre dans le présent, sans prévision de l’avenir.