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Page:Les Œuvres libres, numéro 14, 1922.djvu/357

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à mon renom. J’y ai montré une lenteur d’esprit lamentable ; je n’ai pas su y apporter ce mélange d’imagination et de sens positif qui est à la base de mon art. La seule écornure de la balustrade aurait dû, je le confesse, m’acheminer vers la solution du problème ; je m’en veux, de n’y être pas arrivé plus tôt.

« Certes, les moyens mis en œuvre par la malheureuse Mrs. Gibson dans l’exécution de son dessein étaient d’une complication trop subtile pour qu’on s’en avisât d’emblée. Je ne crois pas que, dans aucune de nos aventures, nous trouverions un exemple plus étrange de ce que peut faire un amour perverti. Aux yeux de Mrs. Gibson, une rivalité purement spirituelle en valait une autre et, de la part de miss Dunbar, constituait un tort aussi impardonnable. Lorsque à ses témoignages d’affection son mari ne répondait que par des procédés fâcheux et des paroles rebutantes, certainement elle en faisait grief à la jeune fille, qui n’en pouvait mais. Sa première idée fut de se tuer ; sa seconde fut de s’y prendre de telle manière qu’elle infligeât à miss Dunbar un sort encore plus affreux.

« Nous pouvons suivre un à un les développements de sa pensée : ils dénotent une ingéniosité remarquable. D’abord, elle trouve le moyen de se faire adresser par miss Dunbar un billet d’où semble ressortir que la jeune fille a choisi elle-même le lieu du crime ; et, dans la préoccupation d’assurer la découverte du billet, peu s’en faut qu’elle-même n’en détruise l’effet en le tenant à la main quand elle se donne la mort : ce seul fait aurait dû éveiller plus tôt ma méfiance.

« Puis elle prend un des revolvers dont vous avez vu que son mari avait tout un lot, et elle le garde pour son propre usage ; mais le matin du jour où s’accomplira sa funèbre résolution, elle cache un revolver semblable dans la garde-robe