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ASIE

IV

L’épreuve.

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La blonde.

Lorsque le « greffier » de mon tribunal m’eut quitté, je demeurai un instant à goûter la subtile ironie de cette situation. Jamais homme au monde fût-il fourvoyé en pareille impasse ? Je me trouvais en nécessité de conjouir trois femmes du Turkestan, dont j’ignorais d’ailleurs, car ces peuples sont fourbes, si elles avaient le moindre désir de me sauver ou si elles ne s’amusaient pas à un jeu inédit et cocasse, dont ma mort restait la seule certitude.

Mais je suis homme d’ordre. Il fallait, en présence de cette péripétie extravagante, agir comme si ces femmes étaient sincères, et même comme si elles avaient l’intention affirmée de me faire mettre en liberté, avec une nouvelle qualité d’époux, pour peu que je les satisfisse. J’allais donc avoir trois échantillons différents à intimiser d’une race — ou de plusieurs — dont les femmes ne sont pas précisément accessibles.

Après les fatigues de ce voyage, accompli ficelé dans un vaste panier insuffisamment confortable, serais-je en mesure de faire un amoureux congru ? Ces femelles asiatiques attendaient-elles de moi des exploits galants multiples et effervescents, à la mode espagnole, des fioritures galantes, ou des pratiques neuves et inconnues ?

La question avait une importance essentielle. Sur trois corps que j’aurais à satisfaire, il m’était permis de me tromper une fois, et, au maximum, deux, mais