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Mais résigné bientôt, et comme sans embarras, à une situation qu’il ne pouvait éviter, il vint à eux d’un air assuré, leur présenta de courtois hommages, assistant même à la fin de leur souper, sans toutefois y prendre part : il ne pouvait partager ni le vin des gentils, ni leurs mets, préparés dans des vases impurs.

La porte de l’auberge était demeurée ouverte. Les Cappadociens, échangeaient avec gaîté des propos puérils. L’air de la nuit était très doux, sans trop de fraîcheur. Mais ce fut bientôt, derrière l’auberge, le bruit d’une porte, refermée, et deux hommes, accompagnés d’Agapios, rejoignirent la route, apparemment sortis par le jardin. Quatre des Cappadociens, s’étant levés précipitamment, coururent à l’un d’eux, cherchant avec respect à baiser le phélonion violet dont il était vêtu. Mais Agapios ayant fait un geste pour montrer que l’auberge n’était pas vide, ce personnage parut leur intimer l’ordre qu’ils n’eussent point à le reconnaître. Pourtant le Juif Aristodème avait distingué ses traits :

— Synésios, l’évêque, chrétien de Thessalonique !

Puis il se tut, réfléchissant profondément. Ignorant dans quelles intentions Agapios l’avait ainsi mandé chez lui ; l’avertissant d’entourer sa visite d’un certain mystère, il se demandait si l’arrivée de ces voyageurs n’avait point quelque rapport avec l’affaire qu’il aurait à traiter. Il essayait, déjà, d’en tirer les conséquences.

En effet, dès que ces étrangers se furent éloignés, Agapios lui fit signe de le venir joindre, et l’entretint assez longuement sur la route.

Pendant ce temps Myrrhine et Théoctène remontaient dans leurs litières. Un feu subtil, qu’excitait encore l’allégresse du vin, courait dans leurs veines. Ils avaient hâte de retrouver la ville, leur chambre, la lampe où Myrrhine