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non plus ; ils en pouvaient ailleurs rouvrir d’autres. Le seul moyen efficace d’anéantir la secte était d’empêcher celle-ci de célébrer les rites de purification — ce qu’on appela plus tard les sacrements — qui étaient devenus sa raison d’être. Pour cette célébration, certains objets, surtout les livres contenant des formules précises, invariables, considérées comme magiques, étaient nécessaires. De là le prix qu’on attachait à l’en priver. Velléius savait bien ce qu’il faisait en insistant sur ce point ; et, à travers Myrrhine, il se félicitait d’atteindre Théoctène, auquel il gardait rancune, n’étant point sans avoir soupçonné que sa femme ne lui était pas restée indifférente. Il ne se doutait pas qu’au contraire, il s’associait ainsi à la vengeance d’Eutropia, qui par surcroît espérait reconquérir son amant quand Myrrhine aurait disparu. Ce sont des choses qui arrivent.

— Jeune fille, demanda Pérégrinus, qui t’a donné ces livres ?

— Personne…

— Personne ? Veux-tu dire que tu les as dérobés chez des chrétiens, ou trouvés par hasard ?

— Hélas, pas davantage. J’ignorais qu’ils fussent chez moi.

Velléius fit entendre un petit rire : l’excuse était commode.

Théoctène, irrité, ne put garder plus longtemps le silence :

— Les gens qui prétendent gouverner Corinthe deviennent-ils fous ? Voilà une enfant qui n’est pas chrétienne, qui est prête à le jurer, et ceux qui la connaissent sont prêts à confirmer son serment. Peut-on citer le nom d’un chrétien en relations avec elle ? La possibilité d’une collusion avec la secte est-elle alors vraisemblable ? Qui peut rester à l’abri d’une pareille aventure : n’importe quel esclave infidèle, soudoyé par un