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— Hé là !… — s’exclama le comte de Trêves, impressionné, quoi qu’il eût d’abord dit…

— Oui ! — constata, sans un mot de plus, le comte de la Cadière, après qu’il eût dûment vérifié que la Feuille de Rose, pas plus de ce côté-ci de l’île que de l’autre côté, n’était indiscutablement pas…

Le paysage apparaissait d’ailleurs inouï de splendeur : la mer, couleur de lapis, s’étalait, telle une plaine de métal fondu, et frissonnant, sous le ciel, telle une voûte infinie, couleur de lumière.

Ils n’admirèrent l’un ni l’autre, La Cadière ni Trêves ; et ils s’en furent, muets.

XV

Ils étaient assez lourdement redescendus, tous les deux, M. de Trêves et M. de la Cadière ; ils étaient redescendus, le long des flancs du Pic, jusqu’à l’orée de la caverne au Grand Puits. Là, ils avaient retrouvé toute la compagnie, tous les hôtes du yacht, devenus les naufragés de Graciosa. Naufragés sans naufrage ; naufragés tout de même. La Cadière n’en cacha rien, tout de go, à lord Nettlewood :

— Mylord, — déclara-t-il sans préambule, — il n’y a pas plus de Feuille de Rose de l’autre côté de la montagne qu’il n’y en a de ce côté-ci, ou sur ma main.

Un silence déplorable suivit. Après quoi le prince AIghero, le premier, liquida la situation :

— Si la Feuille de Rose a péri… et je ne vois guère d’autre hypothèse… il nous reste à périr aussi, nous, de faim…

— Ah ! Non ! — protesta vivement la vieille marquise d’Aiguillon. — Mon cher monsieur, ne dites pas de bêtises !…