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lanstère. Et d’autant mieux pour votre tranquillité : car ces dames, mylord, telles que je les connais, et même nous deux absents, sont encore très capables de vous donner du tintouin. Je désire me tromper ; je passe outre ; et je vous souhaite le bonsoir. Nous nous reverrons sous peu, d’ailleurs, mesdames, mylord et messieurs : dès que nous serons morts. Ce qui ne saurait tarder, car on ne vit guère longtemps sans manger.

Il se tourna vers son complice, — don Juan Bazan, — qui déjà prenait le large, une assiette sur chaque main :

— Très cher, vous y êtes ?

La réponse vint, qui s’éloignait déjà :

— Très cher, j’y suis : je vous précède !

Alghero, sur-le-champ, s’en alla. Du seuil, par-dessus l’épaule, il jeta simplement un dernier adieu, bref :

— Mesdames, mylord, messieurs, bonne mort !

XVIII

— Il est inouï…, balbutia, après un silence, lord Nettlewood, — il est inouï qu’en de telles et si déplorables circonstances, deux de nos compagnons.… et des plus chers !… aient cru pouvoir nous quitter… nous fuir… déserter !… comme ils ont fait !…

Lors, assez brusquement, le comte de la Cadière le coupa :

— Mylord, excusez-moi : mais, d’une part, les gens qui préfèrent aller mourir ailleurs sont dans leur droit ; et, d’autre part, ils ne nous intéressent pas le moins du monde, par ce fait même qu’ils se désintéressent de nous. Je supplie donc Votre Seigneurie de n’y pas songer une seconde