Page:Les œuvres libres - volume 1, 1921.djvu/87

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Voulez-vous me laisser rire ? — répliqua Germaine, tout court.

Et, l’autre allongeant une main, elle-même en allongea deux. Une poussée s’en suivit, puis une autre. Puis une chose. Puis une lutte, — furieuse, — féroce, — à corps perdu. — Une bataille…

XXII

Une bataille qui dura.

Grace Ashton avait d’abord voulu seulement passer son chemin, et franchir l’obstacle vivant que lui était Germaine Francheville. Mais celle-ci la repoussant très brutalement, des coups, tout de suite, s’en suivirent. Or, rien n’est si féroce qu’une femme dans ses combats, parce que rien n’est si maladroit à combattre. Au lieu de frapper à poings fermés, une femme frappe à griffes ouvertes. C’est ensemble moins efficace et plus malfaisant. Mesdames Ashton et Francheville s’étant fait réciproquement très mal, tout de suite, tout de suite leur bataille s’exaspéra.

En vérité, pour la décrire, c’est Homère qu’il faudrait.

L’une chancela. L’autre tomba. Celle-ci égratigna celle-là. Celle-là échevela celle-ci. Toison brune et toison blonde se mêlèrent. Cependant que les deux bouches, rose-blond, rose-brun, si différentes, et pourtant si également charmantes, échangeaient des injures dont une poissarde se fût d’abord offusquée.

Alentour, il y avait l’île ; — l’Île au Grand Puits…

… L’île quaternaire, ou tertiaire, ou secondaire… l’île primitive, qui sait ! sur laquelle, sans la changer d’un creux ni d’un angle, des siècles