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Illusion, — et illusion. Fausses toutes deux. Absurdes toutes deux. Mais égales. Et contenant, celle-ci comme celle-là, égale fraction de vérité mystérieuse.

Je sais cela.

… Et ceci encore :

Que, là-bas, doit m’arriver, — m’arrivera, — bientôt ! — que, là-bas, va m’arriver — un malheur.

Un malheur qu’ici je ne puis expliquer ; que vous ne pouvez comprendre ; que moi-même, ici, je ne comprends plus : parce que, ici, rien de pareil n’existe. De même, là-bas, je ne pourrais expliquer et l’on ne pourrait comprendre ce qu’est la mort : parce que, là-bas, la mort n’existe pas. Rien ni personne, jamais, là-bas, ne meurt. Et moi-même, quand j’y suis, je cesse d’imaginer l’idée de mort ; comme, revenu ici, je cesse de concevoir la signification du malheur dont je suis là-bas, menacé, et parfois obsédé jusqu’à la terreur.

Je sais néanmoins que le malheur m’arrivera. Et je sais qu’il tombera tout à coup sur moi, comme tombe la foudre. Mais je ne sais ni le jour, ni l’heure, ni le lieu… Confusément, je devine que ce sera quelque part alentour de l’un des deux Temples… et en tout cas je n’ignore pas de quelle main le coup viendra.

D’une main trop connue, et trop dangereusement. D’ici même je la vois, aussi bien que je dois, là-bas, la sentir un jour. Je la vois : — petite, sèche, habile au stick et aux rênes… l’auriculaire en est ligoté d’une chevalière de platine, lourde.

Telle est la main. La main de l’Homme à