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« Sentir, sentir toujours, en tout.

« Il est bon d’être emporté dans le mouvement des astres avec la résignation en sentant au travers de l’espace la chaleur de votre main. »

Justin Fresnois.
Les Femmes

Après une journée de chemin de fer et deux heures de montée à pied, Vernalle arriva au bas du pic de Sanal. Nuit noire : il ne vit rien.

Il mangea rapidement : Fresnois et sa sœur avaient déjà dîné. Elle était gentille, les yeux étonnamment brillants. On ne causa point et il fut tout de suite à sa chambre.

Le lendemain, sitôt après le café, le peintre le conduisit devant le paysage :

— Venez voir ce dont je vis.

C’était à vingt mètres de la maison.

L’extase vous aplanissait l’âme aussitôt.

Vernalle s’assit sur le tertre dont la pente douce descend vers la base de la colline divine qui, en face, juste au milieu de la perspective, élève, par une montée suave, son cône parfait, vert et doré de gloire, à la hauteur des yeux. De part et d’autre, derrière, sinuent deux chaînes de montagnes superposées : la première sombre, forestière ; la deuxième, toute vaporeuse de lointains où se pâment les bois, les champs et les prairies dans un poudroiement céleste et chaud sous le firmament habité de nuages. À droite, à gauche, des massifs divers mais d’un poids égal : l’un raide, colossal, sombre et velouté, l’autre mol, ample et chatoyant d’ardentes tendresses. Et aux