Page:Les œuvres libres - volume 42, 1924.djvu/108

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Ivan. — Ah ! si la mort venait plus vite !…

(Paraît un chemineau, sa besace au dos et un bâton à la main.)

Groucha. — Tiens, voilà quelqu’un !

Ivan, au chemineau. — Qu’est-ce qui t’amène par ici ?

(On entend de nouveau des cris d’enfants. Groucha rentre dans l’izba.)

Le Chemineau. — Il n’y a pas de train. Celui que je puis prendre ne part que demain, et la gare est si étroite… Alors j’ai pensé qu’on me donnerait peut-être asile quelque part.

Ivan. — C’est bon… Attends… ma bru ne va pas tarder…

Le Chemineau. — Merci… Eh bien ? Comment ça va ?

Ivan. — Aussi mal que possible… Ah ! si la mort venait plus vite !

Le Chemineau. — Tu es malade ?

Ivan. — Malade, oui…

(Silence.)

Le Chemineau. — Quelle maladie ?

Ivan. — La misère… on manque de tout… nous sommes cinq… tous veulent manger et nous n’avons récolté en tout et pour tout que quatre boisseaux de blé !… Et il faut vivre avec cela ! Naturellement on est obligé d’aller travailler chez les autres… et quand beaucoup vont se louer, le prix diminue… Et les riches font de nous ce qu’ils veulent… La population augmente, mais la terre, elle, n’augmente pas…

Le Chemineau. — Et moi qui pensais que les paysans maintenant vivaient très bien…

Ivan. — On pense ça, quand on est malheureux à la ville.

Le Chemineau. — On raconte qu’ils dépensent maintenant beaucoup d’argent.

Ivan. — Qui ?… Les paysans meurent de faim et tu dis qu’ils dépensent de l’argent…

Le Chemineau. — Je dis ce qu’impriment les