coup. Nous sommes des militaires, nous ne discutons pas, nous agissons. Appelez-le !
L’Aide de camp. — Je puis disposer, général ?
Le Général. — Allez, mon ami.
Le Général, s’assied. — Non, colonel, vous n’y êtes pas. Ce n’est pas ainsi qu’il faut traiter de pareils individus. Il faut prendre des mesures décisives. On coupe le membre malade pour sauver le corps de la gangrène. Le danger, c’est la douceur. Qu’il soit prince, qu’il ait une mère, une fiancée, tout cela ne nous regarde pas. Nous avons devant nous un soldat, c’est tout.
Le Colonel. — J’ai pensé que le raisonnement…
Le Général. — On ne raisonne pas : on décide. J’en ai déjà eu un du même genre. Ça n’a pas traîné. Il faut qu’il sente qu’il n’est rien : un grain de poussière. Il n’arrêtera rien, il sera broyé…
Le Colonel. — On peut toujours essayer.
Le Général. — Essayer quoi ? Il n’est nul besoin d’essayer. Je ne suis pas à l’âge des essais. Je sers mon souverain depuis quarante-quatre ans. J’ai donné ma vie, je donnerais toute ma vie pour son service et un gamin viendrait me faire la leçon ? Il va me débiter des théories philosophiques, des textes religieux. Qu’il discute avec les professeurs et les popes ! Avec moi, c’est inutile, je ne connais qu’une chose : il est soldat, s’il veut servir, et prisonnier, s’il ne veut pas. Voilà !
Le Général. — Placez-le ici.
Boris. — On n’a pas besoin de me placer. Je me tiendrai où je voudrai, car je ne reconnais pas votre pouvoir, oui…
Le Général. — Silence ! Ah ! tu ne veux pas reconnaître mon pouvoir. Je te forcerai bien à le reconnaître.
Boris, s’asseyant. — Comme vous avez tort de crier !