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LA DENT D’HERCULE PETITGRIS

l’empêcher de sortir de son puits. Elle entre par la fenêtre si la porte est close. Mais la porte est au bout de mon bras, et vous ne m’interdirez pas de l’ouvrir, n’est-ce pas, mossieur le Ministre ?

Rouxval, excédé, ouvrit lui-même. L’huissier passa la tête.

— Monsieur le Ministre, le monsieur qui est sorti tout à l’heure avec la dame réclame son pardessus.

— Son pardessus ?

— Oui, monsieur le Ministre, ce monsieur l’a oublié, ou plutôt il y a eu changement.

Hercule Petitgris expliqua :

— En effet, monsieur le Ministre, je m’aperçois qu’une erreur a été commise. Ce monsieur a emporté mon pardessus et m’a laissé le sien. Peut-être pourrait-on introduire ce monsieur…

Rouxval acquiesça. L’huissier sortit et, presque aussitôt, M. de Bois-Vernay entra.

L’échange des pardessus eut lieu. Le comte, après avoir salué Rouxval, qui affectait de tourner la tête, s’en alla vers la porte et saisit la poignée de la serrure. Mais, sur le seuil, il hésita et murmura quelques mots qu’on ne pouvait entendre. Enfin, il revint au milieu de la pièce.

— Les dix minutes sont écoulées, monsieur le Ministre, murmura Petitgris. Par conséquent la chose va se produire.

Rouxval attendait. Les événements semblaient se soumettre aux prévisions du policier.

— Que désirez-vous, monsieur ?

Après une longue hésitation, M. de Bois-Vernay demanda :

— Monsieur le Ministre, est-ce que vraiment vous avez le projet de nous dénoncer ?… Les conséquences d’un tel acte seraient tellement graves, que je me permets d’appeler votre attention… Pensez donc, le scandale… l’indignation publique…

Rouxval s’emporta :

— Eh ! monsieur, puis-je faire autrement ?