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LES BRAVES GENS.


CHAPITRE XX

Les Nay déménagent. Thorillon entrevoit Charles Jacquin et fait la connaissance de M. Karl Schirmer.


Une grande lettre à cachet rouge que reçoit un matin M. Nay vient changer les occupations de Thorillon. Comme un moine copiste du moyen âge, il reste penché de longues heures sur un chef-d’œuvre de calligraphie dont il veut faire la surprise à tout le monde. Le chef-d’œuvre bien et dûment parachevé, il en admire de près les détails, et de loin l’ensemble ; et quand il peut se dire que c’est parfait, et qu’il n’y a plus rien à y ajouter, il suspend le chef-d’œuvre à une des fenêtres qui donnent sur la route. Et les passants s’arrêtent pour lire en caractères de la plus exquise fantaisie : — Pavillon avec jardin et herbage à louer présentement. — Vue magnifique sur la Seine. — Le peintre-vitrier de Caudebec, qui passe pour aller à Villequier peindre l’enseigne d’un nouveau cabaret, s’arrête stupéfait et étudie longtemps la pancarte en sifflant. Il flaire un rival dans l’auteur anonyme de l’écriteau. Son front se rembrunit, et il est mélancolique le reste de la journée.

Les gens qui flânent pour tuer le temps se disent entre eux, au