Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/8

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gneurs bannerets ne devroient pas avoir de couchette devant le feu ; toutesfois, depuis dix ans, quelques dames du pays de Flandres l’y ont eue. L’on s’est moqué d’elles, et avec raison, car du temps de Madame Isabelle, nulle ne le faisoit ; mais aujourd’hui, chacun agit à sa guise. Aussi est-il à craindre que tout n’aille mal, car le luxe est trop grand, comme chacun dit.

« Dans la chambre d’une accouchée, le plus grand prince du monde s’y trouvât-il, nul ne peut servir vin ou épices, excepté une femme mariée. Si quelque princesse vient rendre visite à la malade, c’est à la première dame d’honneur de sa suite qu’il appartient de lui présenter le drageoir3. »

De chez les grands, une partie de ces usages ne tarda pas à se répandre chez les bourgeois des bonnes villes devenus riches et puissants. Christine de Pisan, cette femme poète, historien de Charles V, a parlé, dans son livre du Trésor de la Cité des Dames, du luxe étalé par les bourgeoises, et principalement par celles de Paris. « Ce n’est pas, dit-elle, aux marchands de Venise ou de Gennes, qui vont oultre-mer et dans tous les pays du monde, qui ont leurs facteurs, achettent en gros et font grands frais, que ces remontrances s’adressent : ceux-là envoyent leurs marchandises dans toutes les contrées, amassent de grandes richesses, et sont appelés nobles marchands ; mais la femme dont je veux parler achette en gros et vend au détail pour quatre sous de den-


3. Les Honneurs de la Cour, publiés à la fin du tome II des Mémoires sur l’ancienne chevalerie, par La Curne de Sainte-Palaye, 1759, in-12, 3 vol.