Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/132

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ce genre et applications de ces idées. Pâris a cru bon d’enlever la femme de Ménélas ; Hélène a cru bon de le suivre. Si Ménélas avait cru bon de se dire que c’est tout profit que la perte d’une pareille femme, que serait-il arrivé ? C’en était fait non seulement de l’Iliade, mais encore de l’Odyssée. — Toutes ces choses importantes ont-elles donc tenu à si peu ? — Qu’appelles-tu ces choses importantes ? — Les guerres, les dissensions, la mort de tant d’hommes, la destruction de tant de villes. — Et qu’y a-t-il d’important là-dedans ? — Quoi ! rien ? — Qu’y a-t-il donc d’important dans la mort d’un grand nombre de bœufs ou de brebis ; dans l’incendie ou la destruction d’un grand nombre de nids d’hirondelles ou de cigognes ? — Quelle analogie y a-t-il entre ces deux genres de choses ? — Une complète. On a détruit là des carcasses d’hommes ; ici des carcasses de bœufs et de moutons. On a incendié là des gîtes d’hommes ; ici des nids de cigognes. Qu’y a-t-il donc là d’important ou de grave ? Ou bien montre-moi que la maison de l’homme est supérieure au nid de la cigogne en tant que demeure. La seule différence, c’est que l’un fait son gîte avec des solives, des tuiles et des briques ; l’autre avec de petites branches et de la boue. — Est-ce donc la même chose qu’une cigogne et qu’un homme ? — Que nous dis-tu là ? Ils sont la même chose, quant au corps.

— L’homme n’est-il donc en rien supérieur à la cigogne ? — À Dieu ne plaise ! Mais ce n’est pas par ce côté qu’il lui est supérieur. — Par quoi donc lui est-il supérieur ? — Cherche, et tu trouveras que c’est par autre chose. Vois si ce n’est pas