Page:Les Français peints par eux-mêmes - tome I, 1840.djvu/163

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LE MEl>ECI>i. Kl !)

iiu’dwiil. Le mi’Jecin n’est jalllai^ i)lu> ^ 'u>v que lorsqu’il exerce sur ses propres iloiiuées, et que la maladie (|u’il eoiiibal na (lab été autorisc^e par l’expérieuee des siècles, ou prévue par les décrets de la Faculté. Celle-ci évite surtout de consacrer aucune doctrine : ce n’est pas un [wuvoir responsable, parce que, peut-(^tre, il y aurait trop de danger i l’être. Les fautes sont personnelles en médecine. Les philosophes et les médecins eux-mêmes aftirnient que la médecine use l’Ame au protit du cor|)s ; en d’autres ternies , qu'elle i>erfectionue le corps en vertu d’un certain épicuréisnie philosophique. Xu moral le médecin vit beaucoup ])our lui-même , il >e fait d’ordinaire une religion de son égoïsme ; le reste de l’humanité n’existe pas pour lui, attendu que tout le monde n’a pas l’honneur d’être médecin. Ot amour du positif se formule en idolAlrie pour l’argent. Suivez un médecin depuis son entrée dans la carrière pratique : souple d’abord et in^inuant, il prendra insensiblement le ton sec , tranchant , d’un honniie dont la réputation s’augmente et dont la caisse s’emplit. Bientôt maître de sa clientèle et de son entourage, sa parole sera celle d’un maître ; elle coiUera aussi cher que celle d’un procureur. La vie et la mort s’échapperont de ses lèvres selon son bon vouloir ; mais il fera plus de cas d’un écu que d’un homme : l’argent sera le iwint de mire de toutes ses actions.

. cette époque , s’il n’a pas la croix , — et ceci est une grande question pour le médecin, il l’achète ou la fait acheter ; si le grand chancelier delà Légion d’honneur le rejette de son KIdorado, il a recours A quelque ordre équivoque qui se rapproche par la couleur de ses insignes du ruban si désiré, non qu’il y tienne comme A une distinction, mais parce qu’il voit un supplément de clientèle au bout d’un ruban. Le médecin n’oublie jamais d’être <le queli|u’un ou de quelque chose, le public veut savoir d’où viennent les grands médecins.

.Avant même d’être une sommité, un médecin est devenu profondément sensualiste : l’étude et la vue des souffrances, en lui donnant le moyen de les éviter, lui en ont rendu la jouissance plus précieuse ; aussi escelle-t-il à user, tempérer ou développer tout ce qu’il est donné à l’homme d’en éprouver. C’est le médecin qui brûle lui-même son moka, qui choisit ses perdreaux truffés chez Chevet ; c’est lui ipii a inventé la salade d’ananas ; la |ilupart des rafrinements culinaires dérivent de la médecine. Uuand l’humanité est au plus mal , le médecin nage dans les réjouissances sociales.

Il faut l’avouer aussi , du sein de la médecine surgissent de temps à autre de grandes individualités qui ont nom Dupuytren, ou quelques autres qu’il serait imprudent de citer parce qu’elles existent encore. (^)uand un médecin parvient à échapper au petit mercantilisme de sa profession et aux soins exclusifs de sa clientèle, disons mieux, à l’inllividuali^nle qui nous ronge, il peut tout comme un autre devenir un grand homme. Observons cependant que, même dans sou hypothèse, son action a été jusqu’à présent purement individuelle. La médecine manque de ces vues générales qui embrassent tout un peuple, toute une nation. 1 ont se fait chez nous dans des intérêts de {lersonncs , de famille tout au plus. Un médecin ne comprendra jamais qu’on puisse travailler à perfectionner l’hygiène d’une grande ville, et à réformer les abus qui compromettent la santé de toute une classe d’hommes. Il est vrai que c’est l’affaire