Page:Les Français peints par eux-mêmes - tome I, 1840.djvu/264

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’H» Ll£ DI-IM Ti :.

plus coiuimiu que le nom, lieu ii’ost plus luie que lu cliose. Quehjues oig ;niisulions puissaates, les unes viviûées par la force iaspiiati’ice , les autres par un esprit toujours prompt et toujours présent, plusieurs par des convictions profondes et aussi par l’érudition la plus variée, échappent seules h cette loi commune qui rend si difficile a Tbomme l’usage de la parole qui lui a été donné, ou pour exprimer, ou pour déguiser sa pensée. Une dernière répétition générale eut lieu dans la chambre d’Auguste. Je représentais rassemblée , je Ds de mon mieu< pour imiter le tumulte dans toutes ses périodes de naissance et de développement, depuis le murmure des conversations particulières, jusqu’aux vagues des interruptions etjusqu a la lorapêle et au soulèvement général. Je le dressai "a tenir son manuscrit toujours à sa portée, de manière "a ne pas s’exposer à être averti |iar le président , comme cet orateur novice qui cherchait ses idées et ses mots, et auquel M. Dupincria si impitoyablement : « Regardez vos feuillets, u Le triste hère , honteux et confus, descendit de la tribune. Le lendemain, Auguste, aguerri contre tous les accidents, même conire la cliiite du verre d’eau sucrée, monta h la tribune et prononça son discours , sans faute, sans encombre et le plus correctement du monde. Personne n’y fit attention : les députés étaient peu nombreux, la séance était a peine commencée, et il ne fut écouté que par quelques dames qu’il avait galamment placées dans une tribune , au moyen de billets obtenus la veille de MM. les questeurs pour cette grande et redoutable solennité, dont nous étions les seuls confidents. Présentement un député fait hommage de son premier discours , comme Thomas Diafoirus offrait la thèse qu’il devait soutenir sur une femme morte avec son embryon.

J’étais avide de connaître les sensations de l’orateur ; je m’attendais Ii quelque fanfaronnade et ’a quelque acte de forfanterie ; contre toute attente, il fut modeste. Il confessa que la trihnne lui avait paru être a une hauteur extraordinaire ; il avait ressenti des étourdissements ; sa langue s’était collée a son palais ; sa bouche était devenue sèche, et sans le secours d u verre d’eau sucrée, il n’eût pu prononcer une seule parole ; ses jambes avaient fléchi, el il avait éprouvé une émolion semblable à celle que Cliarlet prête a Jean-Jean, lors du premier coup de feu. Je le consolai de mon mieux. « M. de Pradt, lui disais-je, n’a jamais pu aborder la tribune ; il n’y retrouvait pas un seul des arguments qu’il avait préparés et savamment élaborés, pour terrasser ses adversaires. Un jour il s’écriait douloureusement : « Je donnerais dix ans d’expérience pour six mois de tribune. » Plusieurs orateurs vieillis dans nos assemblées politiques m’ont déclaré que jamais ils n’étaient montés "a la tribune sans un sentiment de souffrance ; pour prendre la parole, un violent effort sur eux-mêmes leur était toujours nécessaire.

Je présumais bien que le discours d’Auguslt’, prononcé dans des circonstances aussi peu favorables que celles qui l’entouraient , était de ceux pour lesquels les journaux ont fait stéréotyper celte phrase : « La l’oir de l’orateur ne parvient pasjusifnà nous. 1) J’avais tout prévu : nous avions quatre copies du discours improvisé ; je les portai a différentes feuilles, et le soir, Auguste et moi nous allâmes corriger nous-mêmes les épreuves, jeter au bas des paragraphes quelques parenthèses : {Bien.) [Tre.’i-Bien .) {Vive sensation.] {.isseiitinient f/énvral.) Nous changeâmes quel-