Page:Les Français peints par eux-mêmes - tome I, 1840.djvu/265

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

u ; DKi’i 1 1 :. i !M

f|Uos mois (’Tli.’ippi’s (( la diiilrindr ri))i]}nirisiilioii ;iicmics pns« ;ii ;(’s jijdiikN apivs la discussion aclievèreiil de rcliaussor la liaian ;;iii’. <’l uioyMiiiaiil ces petites jnécaiidons qu’un député intelligent et soigneux de sa léputation ne néglige jamais, Anguste put s’attendre "a recevoir de ses commettants de légitimes félicitations. Klles arrivèrent nombreuses et em[ressécs : il était le protecteur de fon arrondissement, le sauveur de sou pays, la gloire de sa patiic. C.liaqne lettre de (ongratulatinn contenait en même temps une demande, une prière, une pétition, un placet, une sollicitation ou une commission. Chaque commettant émettait un désir, un vœu , un souhait, une envie : le député était proclamé par Ions la providence de son arrondissement ; mais on ue onlail pas que ce l’ut là une sinécure. On le chargeait des emplettes pour toutes les dames : livres, modes, fantaisies, ustensiles , porcelaines et mobilier ; il devait être l’avocat de toutes les [irétentions, faire vahiir tous les droits anciens nouveaux , passés , présents et futurs, être l’écho de tous les mécontents, le patron de toutes les ambitions et de toutes les e.xigences ; on lui conliait le sort de deux ou trois écoliers, qu’il devait aller visiter souvent, faire sortir, et amuseret régaler les jours de congé ; on le rendait i esponsable des fautes de quatre ou cinq étudiants en <lroit ou en médecine, dont il devait surveiller la conduite. L’arrondissement avait aussi ses vues sur la fortune de rtlat ; il fallait s’y consacrer sans réserve , obtenir des secours et des faveurs en argent, en volumes, en tableaux ou en statues ; faire construire des ponts, tracer des chemins, exhausser des vallées, aplanir des montagnes , disposer des régiments de l’armée et détourner des lleuves. Auguste succombait ; il pliait sous le fardeau des ports de lettres ; des avances continuelles dévoraient sa fortune.

Il n’était pas au bout de son rêile de providence. Les solliciteurs assiégeaient sa porte dès le malin : il s’épuisait en apostilles ; les petites audiences absorbaient tout son temps. Toutes les infortunes départementales accouraient "a lui ; sa bourse se tarissait en prêts et en aumônes , deux mois plus synonymes qu’on ne paraît le croire. A son arrivée ’a la chambre, il était assailli par de nouvelles importunités ; on venait exprès de province pour le voir et pour l’entendre : il ne pouvait refuser des billets de séance, une lettre de recommandation pour xoir les monuments publics, quelques heures de son temps pour faire les honneurs de Paris et une présentation au ministre.

Les honneurs vinrent le consoler de ces tribulations : il fut invité à la cour. Pour le coup, il se regarda comme un personnaue : il songea aux emplois, et après avoir tant demandé pour les autres, il crut pouvoir peuser ’a ses propres désiis. Sans être exalté dans ses opinions politiques , sans avoir d’injustes préventions , sans prétendre jouer le personnage du paysan du Danube, Aususte avait pris la sage résolution de s’éloigner de tout ce qui risquait de porter ijuelque atteinte ’a son indépendance. Je ne sais s’il a changé d’idée a ce sujet , mais dernièrement il m’a dit que si tous ceux qui blâment le pouvoir s’en approchaient un peu plus, ils seraient peut-être moins sévères pour lui. Il est vrai qu’Auguste est décoré ; il m’a afOrmé aussi que ta décoration était un objet indispensable "a un député. Selon moi , ce signe, bien loin de le distinguer, le rejette dans le domaine commun.