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LE PAIR DE FRANCE.

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une loi sur les haras , il tressaille comme le cavalier qui entend sonner le boute-selle. Si on prononce le mot de recrutement, il prête l’oreille : il a commencé sa carrière militaire avec Dumouriez A Jenimapes , il l’a finie aux pieds de l’empereur ;t Waterloo. Il porte sa tête avec fierté ; les années, qui ont courbé tant de tailles, ont respecté la sienne, ou n’ont pu la faire ployer. Grave comme une statue antique, il^a un peu de dédain pour la parole, il aime mieux l’épée. Pour lui, de 179J à 1815, il s’est écoulé un siècle, le grand siècle ! et de 1815 à 1839 cent autres années se sont traînées. Or, du grand siècle, il en était, il y a figuré : celui-IA n’est pas fier de sa pairie, il est fier de son épée]’, de sa croix, de .ses cicatrices de l’empire. Auprès de lui , devant , derrière , ;"i ses côtés , et pareils à de légers hussards voltigeant sur les ailes d’un corps d’armée , voye/.-vous les jeunes pairs ? L’un laisse rouler les anneaux de ses cheveux blonds sur ses tempes juvéniles ; l’autre permet à sa jeune barbe d’ombrager sa joue et même son menton Ces messieurs sont les derniers produits de l’hérédité, les derniers fruits d’un arbre coupé à sa racine ; ils sont un élément polit que qui ne se reproduira plus. Que il’autres , fils de généraux plus vaillants, de sénateurs plus utiles à la patrie, d’ancêtres enfin plus nobles que les leurs, ne sont pas pairs connne eux ! jeunes gens confondus aujourd’hui dans la foule des citoyens, parce que leurs pères ont vécu une heure de trop pour leur avenir ! Mais tout est hasard dans ce monde. Le jeime pair est l’espoir des riches héritières et l’orgueil du jokey’s-club. Sa carrière est semée de roses ; il a la main dans le sac du pouvoir, .leune militaire, il est le collègue du ministre delà guerre ; apprenti diplomale, il dispose d’une voix en faveur du président du conseil ; il ne tient qu’A lui de devenir le camarade des princes. S’il est de l’opposition, oh ! alors il devient populaire (pw /"acto,- c’est un Spartiate, c’est un puritain. Une idée généreuse double de prix, en effet , quand elle sort d’une jeune bouche, et si elle parait devoir entraver une fortune déjA commencée. Voyez venir ce petit vieillard : une perruque blanchâtre couvre sa tête chauve ; il marche d’un pas prudent et un peu obli(|ue ; regardez comme les broderies de son habit simt fanées. C’est l’honnne de France qui a le plus souvent levé la main pour