Page:Les Français peints par eux-mêmes - tome I, 1840.djvu/376

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Save/-vous quel est ordinairement, pour les pauvres comédieus nomades, le béuélice de ces pompeuses leprésentalioiisy — 11 faut donner l’entrée gratuite au maire et il ses adjoints, "a leur famille, h leurs connaissances, aux membres du corps municipal, a la gendarmerie royale, au garde champêtre, au bedeau cl au sonneur de la paroisse, au percepteur des contributions, au directeur des messageries, au maître deriiôtel garni et à tousses garçons. Restent, pour tout public payant, quelques amis des arts aux premières loges, deux ou trois muses de province aux baignoires, ii l’avant-sccne quatre ou cini] gants jaunes qui ont suivi lesactrices depuis Paris, enfin une vingtaine de vignerons et de marins d’eau douce au parterre. A peine y a-l-il lii de quoi payer les frais de voyage et de séjour.

Ilcrminie, à mesure qu’elle prendra des aiméeset de l’embonpoint, se fatiguera de ces rares et infiuctueuses représentations devant un public de banlieue. I^lle commencera "a songer aux intérêts de sa foitune autant ([u’a ceux de son ainour-propre. A vingt-cinq ans, elle se présenteia chez l’un de ces correspondants dramati(|ues, que la gent comique a brutalement flétris du sobriquet de marchands de chair humaine ; elle sera engagée pour aller représenter, ;i Rouen ou "a Bordeaux, les leines lie tragédie, les premiers rôles du drame modirne, les grandes coquettes de la comédie. Comme Molière, Corneille, Racine et Marivaux sont un peu tombés en disgrâce dans notre belle France, et que le parterre des pins giandes villes veut le ballet d’aboid, j)uis l’opéra, puis le drame en lever de rideau, elle jouera cent fois la Tour lie Nesie, la Chambre ardente, et tous les ouvrages de M. Anicet-Bourgeois. Puis h ce rude travail ses moyens s’useront ; elle passera des troupes sédentaires dans une Iroupe d’arrondissement, et finira, belle qu’elle est encore et vertueuse (|u’elle a été toujours, par épouser un capitaine de recrutement de Carcassonne, ou un entreposeur de tabacs de Clermont en Auvergne. Et alors, au front de la nouvelle demeure champêtre qu’ellese sera choisie, on pourra écrire ces mois : « Ici git Uerroinie Soufflot, i’lce(iu Conservatoire, etc., elc. ’ Gare... gare... voici Frétilion... Frétillon était fleuriste... mais "a force d’avoir vu jouer Déjazet, à force d’avoir entendu chanter Aciiaid, elle s’est sentie prise d’nn goût singulier pour le théâtre... File fut admise au Conservatoire par la protection de la concierge de l’élablissement, qui est sa propre tante... On lui trouva le minois piquant et la jambe bien faite... On ne désespéra pas de la voir un jour, « Un peu Irop lorle en gueule et trop impertinente !...

1 :11e fut classée dans les tabliers. Elle étudie les Doriue, les Madelon, les biselte, les Fanchon, toutes les soubrettes de Marivaux, toutes les servantes de Molière ! Elle serait inconteslalilenient appelée ’a faire de rapides progrès dans son emploi, si elle n'aimait ]>as tant les parties d’àne ’a Montmorency, les promenades au bois de Boulogne en cabriolet de régie, les toilettes élégantes et les petits repas. .Son début ’a la Comédie-Française ne sera pas plus heureux que celui d’Ilerminie .Souftlot. Un feuilletoniste, amiucl elle aura été recommandée, dira (jucllc a lie l’avenir, et ce sera tont. Mais ne ci aignez pas que nous la perdions, ne craignez