Page:Les Français peints par eux-mêmes - tome I, 1840.djvu/450

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ôiO Lli MAITRE D’i : ILDI’S.

qu’il veut avertir, de soite que, grâce à cette rcticence adroite, tlia(iue élève voit les redoutalilcs cent vers suspendus sur sa tête.

Quelques-uns, méprisant ce langage traditionnel, clierclicnt leur effet dans un niutisnie coMii)Iet. A un moment où la dissipation semble vouloir faire irruption dans leur domaine , ils se lèvent tout a coup . descendent gravement de l’estrade , promènent c’a et là des regards perçants, et, les mains armées du fatal carnet ;i punitions, qu’ils appellent ambitieusement le l’ivre r ou (je , ils attendent. Ainsi posés au milieu de l’étude, sans prononcer une parole, ils inscrivent quelques noms sur le terrible livret. Il est rare que ce manège ue produise pas son effet , et si vous leur en demandez la raison, ils vous répondront orgueilleusement : « C’est seulement pai’ le sang-froid qu’on impose aux niasses. Si j’étais chef d’un gouvernement . je ne calmerais pas autrement une émeute populaire. »

Une chose certaine, irrécusable, une de ces vérités qui acquièrent furce de lois , c’est que le maître d’études est susceptible au delà de tout ce qu’on peut dire. Que le ciel vous préserve d’une conversation avec un maître d’études ! il vous faudra peser toutes vos expressions , veiller à la tournure de vos phrases , épier le sens caché d’un mot, au risque de blesser votre interlocuteur ; car sa susceptibilité se tiendra éveillée et vous demandera compte de chaque mot , de chaque phrase , de chaque expression. Et pour preuve écoutez ce fragment de conversation : " M. Scribe est un ignorant, disait un maître d’études du ton de la plus vive indignation : et penser qu’il y a des gens qui osent appeler cela un homme d’esprit !


— Mais il y en a beaucoup, lui répondit quelqu’un ; et il est fort malheureux pour lui que votre opinion soit différente.

— Ce qui veut dire que je suis incapable de le juger, repartit aigrement le maître d’études ; je vous comprends bien , mais je m’en soucie fort peu. Jamais je n’appellerai spiriluel un liomnic qui écrit de (elles phrases : « On ne petit rien en faire. — Mellez-le dans l’instruction. »

Tenez-vous donc survos gardes, moyennant votre attention ’a ne rien direqui puisse le choquer, il vous charmera de sa conversation aussi longtemps que vous pourrez le désirer, et cela sans aucune réiribution. Il arrive souvent aussi qu’il se montre dur et haulain envers les domestiques. Doit-on s’en étonner ? Dans la hiérarchie d’une pension , le maître d’études a le dernier rang, c’est bien le moins qu’il use de son autorité sur les seuls inférieurs qu’il ail. Il le fait donc largement, en homme qui se dédommage.

Malgré cela , et "a cause de ses vertus privées , le maître d’études éveille toutes mes sympathies, je le déclare hautement, et je vois avec plaisir sa position s’améliorer chaque jour, grâce au soin que les chefs d’inslîtulion apportent a exclure les incapables du sein de celte classe d’hommes si utiles. Espérons que bientôt ces dernier.s ne reparaîtront plus qu’il de rares intervalles, et qu’ils s’effaceront même tout ;i fait pour la plus grande gloire de celte partie rerommandable de la société. Eugène Nvon.