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LES JÉSUITES


vais où mon amour me guide. — N’oubliez pas pour la première fois, lui cria le père Bourdaloue en le tirant par la croix qui pendoit dessus sa robe, tout ce que je vous ai dit quand vous serez avec madame de… Voilà le passe-partout qu’elle m’a donné pour entrer chez elle. — Non, non, mon cher frère, je vous remercie, je me servirai du mien, répondit le père gardien en riant ; l’amour est un bon serrurier, il ouvre les portes les mieux fermées.

La marquise attendoit son galant en déshabillé de couleur rose, couchée négligemment sur un petit lit de satin blanc, dont la broderie représentoit une Paix couronnée de branches d’olivier et de laurier, tenant dans sa main un nombre infini de fleurs qui sortoient de son sein, et le dieu Pluton, de qui les anciens poëtes disent qu’elle étoit la nourrice, étoit à ses pieds et la caressoit. Le père gardien, qui étoit déguisé en officier galant, parut surpris de la beauté du cabinet qui étoit éclairé de plusieurs flambeaux de cire blanche qui faisoient un bel effet avec le reste de la propreté qui l’embellissoit ; mais ce fut bien autre chose quand la dame plus belle que le soleil ouvrit ses bras polis et délicats pour l’embrasser et pour lui dire tendrement, croyant que ce fût son jésuite accoutumé : Venez, mon cher, vous mettre à côté de moi ; il y a longtems que je vous attends. Le bon religieux parut si charmé