riant, que je sois capable de faire un effet si
grand ? — En doutez-vous, charmante, dit le
jésuite en lui baisant le bord de sa jupe, je
ne me connois plus depuis que je vous vois.
Et dans tous les voyages que j’ai faits, je
n’ai jamais rien vu de si parfait que vous.
L’on peut dire, sans vous flatter, que vous
êtes la merveille du monde. — Mon père, repartit
la dame avec froideur, vous m’apprenez
ce que je ne savois pas, et mon mérite
m’étoit encore inconnu ; qui auroit jamais
cru qu’une personne comme vous recluse
dans les déserts eût fait cette découverte ?
— Vous en étonnez-vous, bel ange ? reprit
le père en la voulant baiser ; ne savez-vous
pas que c’est mon talent que de faire des
découvertes ? Permettez que je découvre le
reste de vos beautés. — À quoi songez-vous,
mon père, lui dit-elle en le repoussant ;
croyez-vous que la solitude où nous sommes
me sollicite à vous donner des libertés ?
Non, je n’en ferai rien ; je sais ce que je
dois à mon époux, à mon devoir, et à moi-même.
— Bon, voilà de beaux contes que
vous me faites, madame, interrompit le jésuite ;
les maris en sont-ils moins honnêtes
pour avoir sur leur tête le plumage de l’oiseau
qui chante à présent ? N’entendez-vous
pas, ma chère sœur, ce qu’il dit : coucou,
coucou, répète ce badin, ce n’est qu’une bagatelle.
— Quoi, mon père, répondit cette
dame, comme surprise, traitez-vous de baga-
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EN BELLE HUMEUR