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Page:Les Lois de Manou, trad. Strehly, 1893.djvu/12

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analogues, surtout en ce qui concerne les sources de l’ouvrage.

Loin de nous fournir aucun renseignement sur son véritable auteur, le Mânava Dharma Sâstra débute par une attribution tout à fait fantaisiste du livre au Créateur lui-même. Il est dit en effet dans le préambule que les grands richis ou sages vont trouver Manou, fils de Svayambhou, l’être existant par lui-même, et le prient de leur exposer en détail la loi des quatre castes. Manou consent à leur requête, et après avoir tracé dans les cinquante-sept premiers vers une sorte de cosmogonie, il cède la parole au grand sage Bhrigou, lequel a appris de sa bouche le livre révélé à lui Manou par Brahma, et va le leur réciter en entier. Sans voir dans cette attribution mythologique, bien conforme aux habitudes et aux traditions de l’Inde, une intention arrêtée de surprendre la crédulité des lecteurs, on ne peut s’empêcher de constater qu’elle contribuait à donner une origine surnaturelle à une œuvre humaine, à lui assurer une place à part parmi d’autres compositions analogues, et à imposer à la croyance universelle des peuples un traité qui d’abord n’avait eu d’autorité que dans le cercle assez restreint d’une secte religieuse. Déjà du reste le commentateur hindou Medhâtithi reconnaissait que le début n’est qu’une introduction et que l’ouvrage commence réellement au livre II.

Les Manuels de lois ne manquent pas dans la littérature sanskrite[1], et à côté de celui de Manou plusieurs nous ont été conservés. Les noms de Yâdjnavalkya, d’Âpastamba, de Vichnou, de Brihaspati, de Baudhâyana, de Nârada et d’autres dont la liste serait longue, nous prouvent que chaque école brahmanique a été préoccupée de donner à ses secta-

  1. Consulter à ce sujet l’article de Stenzler dans le volume II des Indische Studien de Weber, p. 232 sqq.