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Page:Les Loisirs du chevalier d'Eon t1.djvu/260

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brouilleries & de raccommodemens. Cette flexibilité d’humeur ; qui d’un côté les rend adroits courtisans, sert de l’autre à faire oublier promtement les injures & les bienfaits ; de sorte que la plupart du tems on peut se dispenser de compter sur leur reconnoissance ainsi que d’appréhender l’effet de leurs menaces. En les étudiant, on les trouve artificieux sous un air de candeur, orateurs nés dans leur langue, stilés aux intrigues presque dès le berceau, cependant plus féconds en expédiens détachés, que profonds dans les principes de la grande politique. Comme la constitution de leur gouvernement leur fournit mille moyens d’être artisans de leur fortune, leur cupidité fermente dès la première jeunesse, & ils ont continuellement l’intérêt public dans la bouche, pendant que le seul intérêt particulier dirige leur cœur. Au reste la soif des richesses n’est pas jointe chez eux avec l’avarice. Jamais nation ne fut plus fastueuse ni plus dépensière. J’ai vu des seigneurs, n’ayant qu’un bien médiocre, donner des fêtes où le vin seul montoit à sept ou huit cents ducats, & les présens en