Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/209

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danses et des concerts, espérant ainsi lui faire prendre goût aux plaisirs du monde. Mais tous ces efforts restaient inutiles.

Le jeune homme n’était jamais sorti du palais, jamais il n’avait vu ni mort ni malade, car le roi avait prescrit qu’on écartât de sa vue tous ces spectacles. Un jour, étant, par extraordinaire, sorti à cheval, il rencontra un cadavre que l’on portait en terre. Sa surprise fut extrême. Il s’informa auprès de ceux qui l’accompagnaient :

— Qu’est-ce donc ? dit-il.

— C’est un homme qui est mort, lui répondit-on.

— Comment ? les homme meurent donc ?

— Oui, ils meurent tous.

Le prince ne dit rien, mais continua tout pensif à chevaucher. Plus loin il rencontra un vieillard qui se traînait avec peine et n’avait plus de dents.

— Qu’a donc cet homme ? demanda le prince. Pourquoi ne peut-il plus marcher ?

— C’est l’âge qui l’accable et qui a fait tomber ses dents.

Le prince alors retourna à son palais, livré à ses réflexions.

— Je ne veux plus, se disait-il, rester dans ce monde qui est mauvais, je veux aller chercher celui qui l’a fait et qui ne meurt point, car je vois bien qu’ici-bas tous les hommes, jeunes ou vieux, doivent mourir.

Une nuit donc, il sortit furtivement du palais et s’en alla, loin des routes, dans les hautes montagnes.