Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/58

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

furent réunis, il leur montra l’évangile et leur fit lire ce texte :

— Est-ce la vérité ? demanda-t-il.

— Sans doute, répondirent les chrétiens.

— Nous allons, dit le calife, en faire l’épreuve. Parmi vous, qui êtes si nombreux, doit bien se rencontrer ce petit peu de foi : ou vous ferez remuer cette montagne que vous voyez là (et il leur en montra du doigt une qui était tout près), ou je vous ferai tous mourir de malemort. Si vous voulez échapper, faites-vous musulmans et obéissez à notre loi. Je vous accorde un délai de dix jours. Passé ce temps, si la montagne n’a pas remué, vous aurez à choisir entre la mort ou la conversion.

Ayant ainsi parlé, il les congédia.

Quand les chrétiens eurent entendu ces paroles, ils furent d’abord saisis d’une grande frayeur, puis bientôt se confièrent à Dieu leur créateur pour les tirer de ce péril extrême. Évêques, prêtres et fidèles, ayant tenu conseil, ne trouvèrent d’autre ressource que de se tourner vers Celui de qui vient tout bien, le suppliant qu’il les prît en pitié et les arrachât aux mains du cruel calife.

Ils passèrent huit jours en prières. Au bout de ce temps un évêque eut une vision. Un ange du ciel l’avertit qu’il fallait recourir à un savetier borgne. Dieu, dans sa bonté, exaucerait la prière de cet homme. Or sachez que ce savetier menait une vie droite : il jeûnait, ne commettait aucun péché, assistait à la messe chaque jour et chaque jour aussi prenait