Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/59

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sur son gain de quoi donner aux pauvres pour l’amour de Dieu.

L’évêque, ayant eu cette vision à plusieurs reprises, en prévint les chrétiens. On fit venir le savetier et on lui dit que ce serait à lui de faire la prière exigée, que Dieu avait promis de l’accomplir si elle venait de lui. Mais on avait beau lui conter le songe de l’évêque, il s’excusait, protestant qu’il n’était point tel que l’on croyait. Pourtant, devant l’insistance de tous, il finit par promettre de faire ce que l’on désirait.

Le jour fixé par le calife arriva ; dès le matin, tous les chrétiens, hommes et femmes, petits et grands, au nombre de plus de cent mille, se levèrent et allèrent à l’église pour entendre la messe. La messe terminée, ils se dirigèrent tous ensemble vers la montagne ; ils allaient en procession, la précieuse croix devant eux, tous chantant et pleurant. Quand ils arrivèrent, ils trouvèrent le calife qui les attendait avec toute son armée de Sarrasins, prêts à les massacrer ou à recueillir leur abjuration, car de penser que Dieu pût exaucer leur prière, personne ne s’en avisait. Les chrétiens avaient une grande frayeur, néanmoins ils plaçaient leur espoir en Jésus-Christ, leur Dieu.

Alors le savetier demanda à l’évêque sa bénédiction, puis, à genoux devant la sainte croix, les mains levées vers le ciel, il commença à prier. « Seigneur Dieu tout puissant, je te conjure, au nom de ta miséricorde, que tu daignes faire cette grâce à ton peuple afin qu’il ne meure pas et que ta foi ne soit ni abattue ni avilie ni méprisée. Ce n’est pas que je sois digne de t’invo-