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CONTES ORIENTAUX

n’est plus liée par le serment qu’elle fit de faire exécuter son rigoureux édit ; c’est à la princesse présentement à y satisfaire de sa part : elle promit sa main à celui qui répondrait juste à ses questions ; un prince vient d’y répondre d’une manière qui a contenté tout le divan ; il faut qu’elle tienne sa promesse, ou il ne faut pas douter que les esprits qui veillent aux supplices des parjures ne la punissent bientôt.

XLIII

Tourandocte pendant ce temps-là gardait le silence ; elle avait la tête sur les genoux et paraissait ensevelie dans une profonde affliction. Calaf s’en étant aperçu se prosterna devant Altoun-Kan et lui dit : « Grand roi, dont la justice et la bonté rendent florissant le vaste empire de la Chine, je demande une grâce à votre majesté ; je vois bien que la princesse est au désespoir que j’aie eu le bonheur de répondre à ses questions : elle aimerait beaucoup mieux sans doute que j’eusse mérité la mort : puisqu’elle a tant d’aversion pour les hommes que, malgré la parole donnée, elle se refuse à moi, je veux bien renoncer aux droits que j’ai sur elle, à condition qu’à son tour elle répondra juste à une question que je vais lui proposer. »

Toute l’assemblée fut assez surprise de ce discours. Ce jeune prince est-il fou, se disaient-ils tout bas les uns aux autres, de se mettre au hasard de perdre ce qu’il vient d’acquérir au péril de sa vie ? croit-il faire une question qui embarrasse Tourandocte ?