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CONTES ARABES.

retirai. Elle continua de visiter tous les jours son amant ; et durant deux années entières, elle ne fit que se désespérer.

» J’allai une seconde fois au Palais des larmes pendant qu’elle y étoit. Je me cachai encore, et j’entendis qu’elle disoit à son amant : « Il y a trois ans que vous ne m’avez dit une seule parole, et que vous ne répondez point aux marques d’amour que je vous donne par mes discours et mes gémissemens ; est-ce par insensibilité ou par mépris ? Ô tombeau, aurois-tu détruit cet excès de tendresse qu’il avoit pour moi ? Aurois-tu fermé ces yeux qui me montroient tant d’amour, et qui faisoient toute ma joie ? Non, non, je n’en crois rien. Dis-moi plutôt par quel miracle tu es devenu le dépositaire du plus rare trésor qui fut jamais. »

» Je vous avoue, seigneur, que je fus indigné de ces paroles ; car enfin, cet amant chéri, ce mortel adoré, n’étoit pas tel que vous pourriez vous