Page:Les Mille et Une Nuits, trad. Galland, Le Normant, 1806, I.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
44
LES MILLE ET UNE NUITS,

moyen de vous perdre ; car en arrivant ce soir, j’ai ouï dire au marchand notre maître une chose qui m’a fait trembler pour vous. » « Hé ! qu’avez-vous entendu, dit le bœuf ? ne me cachez rien, de grâce, mon cher l’Éveillé. » « Notre maître, reprit l’âne, a dit au laboureur ces tristes paroles : « Puisque le bœuf ne mange pas, et qu’il ne peut se soutenir, je veux qu’il soit tué dès demain. Nous ferons, pour l’amour de Dieu, une aumône de sa chair aux pauvres ; et quant à sa peau qui pourra nous être utile, tu la donneras au corroyeur ; ne manque donc pas de faire venir le boucher. » « Voilà ce que j’avois à vous apprendre, ajouta l’âne ; l’intérêt que je prends à votre conservation, et l’amitié que j’ai pour vous, m’obligent à vous en avertir et à vous donner un nouveau conseil. D’abord qu’on vous apportera vos fèves et votre paille, levez-vous, et vous jetez dessus avec avidité ; le maître jugera par-là que vous êtes