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LES MILLE ET UNE NUITS,

d’entr’eux comment s’appeloit le maître de cet hôtel. « Hé quoi, lui répondit le domestique, vous demeurez à Bagdad, et vous ignorez que c’est ici la demeure du seigneur Sindbad le marin, de ce fameux voyageur qui a parcouru toutes les mers que le soleil éclaire ? » Le porteur, qui avoit ouï parler des richesses de Sindbad, ne put s’empêcher de porter envie à un homme dont la condition lui paroissoit aussi heureuse qu’il trouvoit la sienne déplorable. L’esprit aigri par ses réflexions, il leva les yeux au ciel, et dit assez haut pour être entendu : « Puissant créateur de toutes choses, considérez la différence qu’il y a entre Sindbad et moi ; je souffre tous les jours mille fatigues et mille maux ; et j’ai bien de la peine à me nourrir, moi et ma famille, de mauvais pain d’orge, pendant que l’heureux Sindbad dépense avec profusion d’immenses richesses, et mène une vie pleine de délices. Qu’a-t-il fait pour obtenir de vous une destinée si agréable ? Qu’ai-je fait pour en méri-