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CONTES ARABES.

sofa, et après avoir tourné le dos au barbier, de peur de le voir, nous raconta ainsi son histoire :

« Mon père tenoit dans la ville de Bagdad un rang à pouvoir aspirer aux premières charges ; mais il préféra toujours une vie tranquille à tous les honneurs qu’il pouvoit mériter. Il n’eut que moi d’enfant ; et quand il mourut, j’avois déjà l’esprit formé, et j’étois en âge de disposer des grands biens qu’il m’avoit laissés. Je ne les dissipai point follement ; j’en fis un usage qui m’attira l’estime de tout le monde.

» Je n’avois point encore eu de passion, et loin d’être sensible à l’amour, j’avouerai, peut-être à ma honte, que j’évitois avec soin le commerce des femmes. Un jour que j’étois dans une rue, je vis venir devant moi une grande troupe de dames ; pour ne les pas rencontrer, j’entrai dans une petite rue devant laquelle je me trouvois, et je m’assis sur un banc près d’une porte. J’étois vis-à-vis d’une fenêtre où il y avoit un vase de très-belles