Page:Les Mille et Une Nuits, trad. Galland, Le Normant, 1806, IX.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
4
LES MILLE ET UNE NUITS,

Haroun Alraschid prend un de ces livres, et lit les premières pages. Cette lecture l’attendrit : il répand quelques larmes ; mais bientôt il se met à rire ; peu après il recommence à pleurer, et puis à rire ; enfin, il pleure encore, et rit ensuite une troisième fois.

Giafar, attentif aux diverses sensations qu’éprouvoit successivement le calife, ne put s’empêcher de lui dire : « Commandeur des croyans, quel est donc le sujet de ce livre, et pourquoi vous fait-il pleurer et rire presqu’en même temps, comme font ceux qui ont l’esprit aliéné ? Ce livre seroit-il capable de troubler la raison la plus saine, l’esprit le plus solide et le plus judicieux qui soit au monde ? »

« Giafar, répondit le calife, j’excuse ta curiosité ; mais la comparaison que tu fais des diverses affections que je viens d’éprouver avec ce qui arrive aux fous, est déplacée et téméraire, et le jugement que tu portes de ce livre est entièrement faux. Pour