Page:Les Mille et Une Nuits, trad. Galland, Le Normant, 1806, IX.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
5
CONTES ARABES.

t’apprendre quel est son mérite, et te faire voir que je ne suis pas fou, sors de ma présence, et ne parois devant moi que lorsque tu seras mieux instruit, et que tu pourras me dire toi-même le contenu de cet ouvrage. Tu sauras alors pourquoi j’ai pleuré et ri tout à-la-fois. Sors, te dis-je ; et si tu parois devant moi avant de connoître la raison de ce qui te paroît aujourd’hui singulier, et même ridicule, la mort la plus affreuse sera la punition de ton audace. » En disant ces mots le calife ferma le livre, le remit dans l’armoire, et en prit la clef.

L’arrêt que venoit de prononcer le calife jeta le trouble et l’effroi dans l’ame de Giafar. Il sortit accablé de douleur, et se retira chez lui, marchant à pas lents, et réfléchissant à son aventure. « Quel affreux revers, disoit-il, en lui-même ! Je perds mon rang, ma fortune, et me voilà banni pour toujours de la présence du calife ; car comment pouvoir deviner ce qu’il a lu, et les motifs qui ont