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XIX

LE ZABRE

Paul. — J’ai dit que tous les carabiques se nourrissent de proie et par conséquent sont nos auxiliaires pour débarrasser les cultures de leurs ennemis ; je l’ai dit et je me suis trompé : l’un d’eux s’attaque aux céréales. Ses méfaits ne doivent pas cependant diminuer notre estime pour ses confrères, les carnassiers, dont les services sont incontestables. Dans sa famille de mangeurs de chair, il forme une singulière exception avec son régime végétal ; il compte pour un quand les autres comptent pour mille. On le nomme le zabre.

Sa couleur est d’un noir brun luisant. Il est trapu, moins dégagé de forme que les autres carabiques, moins vif d’allures, et cela doit être puisqu’il n’a pas à courir après le gibier. Je n’affirmerai pas cependant qu’il dédaigne un régal de venaison lorsqu’une bonne occasion se présente. Toujours est-il qu’on le rencontre dans les terres à blé. De jour, il se tient blotti sous les pierres, sous les mottes, dans les touffes de gazon. Quand vient la fraîcheur du soir, il grimpe sur les chaumes, atteint l’épi et ronge le grain encore tendre et sucré.