XXVII
LE HANNETON
Jules. — L’affiche de M. le maire ordonnant l’échenillage dans toute la commune est une excellente mesure, je le comprends, puisque si, par insouciance, on les laissait faire, les chenilles nous dévoreraient tout. Vous disiez même qu’un règlement semblable serait à souhaiter contre le hanneton. Je ne vois pas trop le mal qu’il fait. Il nous amuse tant lorsque, retenu par un long fil, nous le faisons voler en rond !
Paul. — Qu’il vous amuse, et beaucoup, j’en conviens. Comme vous, mes enfants, j’ai connu ces plaisirs du jeune âge. Aux premières feuilles, c’est bien une telle affaire ! Le soir, on se retire dans un coin pour se raconter des histoires, où il y a des loups, des forêts bien noires, des voleurs ; on parle du hanneton qui est arrivé ; on fait des projets pour le lendemain. On se lèvera bien matin pour secouer les arbres et faire tomber les insectes endormis ; on aura une boîte percée de trous pour les mettre, des feuilles fraîches pour les nourrir. À la première aube, on est debout. On visite les saules, les peupliers, les haies d’aubépine humides de rosée. La chasse est bonne, les hannetons tombent comme grêle : en voilà dix,