Page:Les Ravageurs, Jean-Henri Fabre.djvu/208

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
LES RAVAGEURS

capitules avant l’épanouissement des fleurs qui les composent.

Jules. — Sans percer une à une les fleurs avec le bec pour y loger les œufs ?

Paul. — L’apion ne prend pas ce soin. Les larves doivent se tirer d’affaire elles-mêmes. Aussitôt éclose, chacune perce à la base la fleur à sa convenance et pénètre dans l’intérieur. Une fois logée, elle mange le cœur du bouton, notamment ce qui serait devenu le fruit, la petite gousse avec sa graine. Cela fait, elle se métamorphose.

Un autre apion, tout aussi petit et tout aussi nombreux, prête main-forte au premier pour détruire les fleurs du trèfle. Il est tout noir, avec les pattes jaunes. Les deux pullulent dans les prairies artificielles. On les trouve rassemblés l’hiver au pied des arbres ; ils attendent que les trèfles fleurissent pour se mettre au travail.

Il semble que ces deux ravageurs suffiraient pour éprouver rudement la plante fourragère. Eh bien ! non : il y en a d’autres, de plus grands, de plus petits, tous acharnés sur le pauvre trèfle. On dirait que les insectes se sont donné le mot pour attaquer de préférence les plantes utiles à l’homme. Ils se mettent trois, quatre, dix, plusieurs centaines au besoin, pour ravager qui la fleur, qui la racine, qui les feuilles, qui la tige de nos végétaux les plus précieux. La vigne a ses chenilles, ses coléoptères, ses pucerons ; le froment nourrit des destructeurs encore plus variés, calandres, teignes, zabres, vers blancs, alucites, moucherons, taupins et tant d’autres ; rien que pour le poirier, on compte cinq cents ravageurs et plus !