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LES RAVAGEURS

semble d’abord très embarrassante pour l’animal, est au contraire parfaitement appropriée au travail de l’insecte. Avec une tarière trop courte, l’ichneumon ne pourrait atteindre les larves sous l’écorce et même dans le bois.

Paul. — D’après la longueur de la tarière, on peut juger de la profondeur où d’habitude l’œuf est pondu. Les ichneumons à longue tarière déposent leurs œufs dans le corps de larves que protège une épaisse couche d’écorce, ou de bois, ou de terre, ou d’autres matériaux ; ceux à tarière courte s’adressent aux larves vivant en plein air, par exemple aux chenilles. Cependant si la chenille est hérissée de longs poils, qui tiennent l’ichneumon à distance de la peau de sa victime, la sonde allongée est encore nécessaire pour amener les œufs dans l’épaisseur des chairs. Mais pour des chenilles à peau rase, sans défense aucune, l’hyménoptère est armé d’une tarière très courte, souvent invisible à l’état de repos. Il faut presser le bout du ventre de l’insecte pour faire saillir l’outil de la ponte, lancette, scie, menu fil ou autre engin de ce genre.

C’est un spectacle des plus curieux que celui d’un ichneumon en chasse. Des chenilles broutent paisiblement sur des feuilles. Un ichneumon survient, il plane au-dessus du troupeau, il choisit du regard les meilleures, il exclut celles dont les flancs recèlent déjà des œufs. Au bruit d’ailes de leur ennemi, les chenilles terrifiées cessent de manger et donnent à droite et à gauche de brusques coups de tête, dans le but sans doute d’effrayer l’ichneumon. L’hyménoptère ne tient compte de ces vaines menaces ; il s’abat