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LES SÉRAILS DE LONDRES

prême degré, donna à mon esprit le goût de la chevalerie, qui fut bientôt encouragé par la lecture des ouvrages de ce genre. J’avois déjà un grand nombre d’adorateurs : découvrant donc en moi la forte passion de satisfaire des désirs amoureux, je résolus, quoique ce fut contraire à l’usage ordinaire des héroïnes, de me marier ; non pas tant pour contracter une haute alliance, avoir des titres et des liaisons de famille, que pour épouser un homme à qui je pensois que je serois fidèle en raison de sa vigueur. Enfin le comte de Médine parut être à mes yeux entièrement l’unique souhait de mon cœur ; il étoit grand et taillé comme un athlète ; il avoit une contenance engageante ; j’avois remarqué en lui quelque chose de plus attrayant que tout le reste. Le mariage eut lieu ; je m’imaginois dans ce moment être la femme la plus heureuse du monde ; je me figurois dans ses couleurs les plus attrayantes, les félicités du lien conjugal. Le jour de notre hymen, quoique le plus fortuné, me parut le plus long de ma vie : enfin la nuit arriva ; et après les cérémonies usitées en pareilles occasions, nous nous mîmes au lit. Mais, hélas ! quel fut mon mécontentement, mon chagrin, ma mortification de trouver que ce que j’avois tant remarqué d’attrayant, en sa personne, que ce qui m’avoit promis tant de plaisir, n’étoit ni plus ni moins qu’une violente rupture. »