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Page:Les Souspirs amoureux de F B de Verville 1589.djvu/46

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Tout malheur apres soy, un soin, une fureur,
Un tourment sans relasche, une cruelle ardeur
Au courage captif qui sous ses loix souspire.

Tous ceux qui forcenez il tient sous son empire,
Consumant peu à peu, & leur sang & leur cœur,
Sous ses mortels effects leur fait sentir l'horreur
Des dernieres rigueurs dont la mort nous martire.

De feux & de souspirs, il perd les langoureux,
Les reduisant en rien tandis que malheureux
Et le Ciel, & le sort, & leur peine ils maudissent.

Ainsi dedans le feu se consomme le bois,
Ainsi parmy les airs s'esvanouit la voix,
Et ainsi à la fin toutes choses perissent.

XLV.


Vous aymerai-je encor, non c'est assez aimé,
Plus j'aime & de tant plus j'afflige mon courage :
Mais helas ! sans aimer comme une froide image
J'errerois icy bas vainement animé.

Je veux donc vous aimer, & encor enflammé
Resentir dedans moy mon amoureux dommage :
Mais helas ! en aimant je voy passer mon aage
Et s'esteindre aussitost qu'un festu allumé.

Que je n'aime donc plus, & qu'heureux de ma vie
Je ne sente le mal qui la tient asservie
Sous l’incertain espoir d'un vain contentement.

Mais l'amour est si doux & si doux mon martire,
Et mon cœur tant à vous, que plustost je desire
Pour tousjours vous aimer, vivre eternellement.

XLVI.


Si le destin le veut j'auray pour recompense
De ma fidelité, un jour ton amitié,
Si amour le permet une douce pitié
Te fera recognoistre une fois ma constance.