Page:Les Veillées du Père Bonsens - Premier entretien (vol 1 et 2), 1865.pdf/29

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bien couramment, et quand je regarde un livre, les yeux me viennent tout pleins d’eau, je suis tout étourdi, et il me semble que la tête va me tourner ; mais j’ai mon garçon qui va sortir de l’école, et ma fille qui est déjà grandette et qui peut lire si vite, si vite qu’on n’y comprend rien. Ils pourront me distraire comme ça le soir. Quelle gazette pourrais-je bien prendre, père Bonsens ?

Bonsens. — N’importe laquelle ; il y a toujours quelque chose à apprendre. Il y en a tant que je ne sais lesquelles t’indiquer. Si tu es rouge prends la Minerve ; si tu es bleu, prends le Pays ou l’Ordre ou l’Union Nationale ou le Défricheur.

Jean-Claude. — Comment ! mais il me semble que c’est le contraire…

Bonsens. — Du tout. Si tu es rouge, prends la Minerve pour savoir si les rouges font du mal. Si tu es bleu, prends le Pays ou les autres pour connaître les sottises ou les fautes des bleus. Un homme qui ne voit pas de journaux est un pauvre aveugle qui ne peut faire un pas sans le secours de quelqu’un ; celui qui n’en lit qu’un est un borgne exposé à marcher de travers.