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Page:Les Veillées du couvent, ou le Noviciat d’amour, 5793 (1793).djvu/125

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du Couvent.

On ne me fera donc, je l’espère, aucun reproche d’avoir aux dépens de la vraisemblance, métamorphosé une puce en Sylphe et un Sylphe en amant ; mais avouez que vous ne vous y attendiez pas… Tant mieux, voilà le vrai talisman de la poësie ; et j’ai suivi de point en point la maxime du bon Horace.

Pictoribus atque poëtis
Quid libet audendi temper fuit œqua potestas.

Il est permis aux poëtes et aux peintres de mentir et de tout ôser. Voulez-vous d’ailleurs des autorités ? ma justification est consignée page 5 de la Barbe-Bleue, et 10 de Robert le Diable et des quatre Fils Aymon… J’ai laissé ma pauvre Agnès couchée seule, voyons ce qu’elle a fait. La nuit entière s’est passée en réflexions sur le prodige inconcevable qui s’est opéré chez elle : son ame ouverte aux délices qu’elle a savourés, a offert toute la nuit à ses yeux l’image enchanteresse du galant immortel qu’elle a si étroitement serré dans ses bras. Plus d’une fois, croyant l’enlacer encore, elle s’est embrassée elle-même, et n’a reconnu son erreur qu’avec de longs soupirs. Ainsi gémit la tourterelle loin de son tourte-